Ces derniers jours à Vintimille…

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Dans la ville de Vintimille plus de 200 migrants dont des familles avec enfants en bas âge se trouvent bloqués, contraints à bivouaquer dans des conditions précaires et inhumaines. A même le sol de la gare ou sur la plage, sans couvertures ni nourriture suffisante, sans quelconque bien de première nécessité, ils sont sujets au harcèlement et aux violences quotidiennes des forces de l’ordre. Dans la matinée du vendredi 16 avril, la police italienne a fait évacuer les bords du parvis de la gare, en détruisant toutes les couvertures et les vêtements qu’ils y trouvèrent et en embarquant au poste 9 personnes toutes relâchées dans la journée avec un avis d’expulsion du territoire à effet immédiat.

Un centre de la Croix Rouge existe pourtant à Vintimille mais beaucoup choisissent de ne pas s’y rendre. Depuis les attentats de Paris, l’accès au centre est soumis à la prise d’empreintes digitales, comme le prévoit le règlement de Dublin selon lequel les migrants doivent être identifiés et présenter leur demande d’asile dans le premier pays d’arrivée en Europe. Pour la grande majorité des personnes en transit ici, un passage par le centre de la Croix Rouge compromettrait le rêve d’une possible protection ailleurs, hors d’Italie.

L’accueil offert par la Croix Rouge n’est pas neutre : celle-ci n’assure pas un rôle purement humanitaire mais participe à la politique de gestion des flux migratoires. En échange d’un repas et d’un lit de camp, ceux qui sont en transit doivent accepter un contrôle renforcé. Comprendre ceci est plutôt élémentaire, pour peu que l’on se rapproche de l’entrée du centre et qu’on y voit les policiers qui y président. Il ne semble alors plus excessif de redéfinir comme un chantage humanitaire le travail effectué par la Croix Rouge.

La situation est aggravée par l’ordonnance émanant du maire de la ville interdisant de partager toute nourriture avec les migrants sur le territoire de la commune. La solidarité doit être réprimée parce qu’elle donne la possibilité aux personnes migrantes d’échapper à ce chantage humanitaire, de pouvoir décider pour elles-mêmes, et peut-être de s’organiser contre la frontière, mais elle rappelle en même temps sa force potentiellement subversive dans cette période toujours plus sombre.

Selon le maire, le “problème” doit se résoudre en “amont”. Demandons-nous alors quel sera cet “amont” : un hotspot, un CIE, un camp d’exilés en Turquie, une prison en Lybie ? Une seule certitude : loin de notre regard. Pas question de laisser troubler l’ordre et la tranquillité citadine de la Riviera par les migrants… le tourisme s’en ressentirait!

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Ce lundi 18 avril dans l’après-midi, une soixantaine d’exilés soudanais bloqués depuis plusieurs jours dans la ville, se sont dirigés vers la frontière franco-italienne en signe de révolte, pour effacer l’invisibilité que le régime des frontières cherche à leur imposer, dénoncer les conditions de vie indignes dans laquelle ils se trouvent et pour revendiquer la liberté de circulation pour tous.

Le premier groupe, composé d’environ 50 exilés d’origine du Soudan (principalement du Darfour) a traversé la frontière à pied en marchant plus de 8 km depuis la gare de Vintimille, le long des voies ferrées. Ils ont étés stoppés au passage à niveau de Menton Garavan par la police française. Quatre fourgons renforcés et deux voitures de police leur barrèrent le chemin. Face au refus des migrants de faire marche arrière, les forces de l’ordre ont réagi par l’usage de matraque et de taser. Le groupe entier a ensuite été détenu par la PAF de Menton, et deux jeunes soudanais ont été particulièrement victime de violences si bien que l’un d’entre eux a dû être finalement emmené à l’hôpital avant d’être remis aux autorités italiennes. D’autres groupes de personnes en voyage ont étés également interceptés par la police tandis qu’ils marchaient vers la frontière et furent raccompagnés à Vintimille.

Au total, ce sont 34 personnes “sans-papiers” qui ont été détenues par la police italienne de lundi à mardi jusqu’à tard dans l’après-midi. Elle leur a prélevé leurs empreinte digitales et a prononcé à leur encontre des obligations de quitter le territoire italien d’ici à sept jours. Les migrants ont dénoncés des violences et des abus : cinq personnes ont étés littéralement malmenées afin de les faire obtempérer par la force à donner leurs empreintes digitales. D’autres ont subis des traitements extrêmement dégradants et violents allant même jusqu’à l’usage de pinces électrique sur les parties génitales.

“People die on the sea, freedom of movement to all”; “We are all one, we want dignity”; “Save us, do not push us back”; parmi les pancartes que seraient dans leurs mains les migrants à peine relâchés.

Cet acharnement est le résultat de la ligne ferme tenue par les pouvoirs français et italiens et dont le souci central semble être de plonger dans l’invisibilité les personnes en voyage. C’est donc une situation de répression sérieuse qui a lieu en ce moment à la frontière, une politique de “gestion” du “problème des clandestins” basée sur la violence et les expulsions systématiques, qui cherche à faire taire et rendre invisible tous ceux qui voyagent.

Samedi 23 avril, un repas collectif a été organisé sur la plage permettant ainsi de braver l’infâme interdiction de partager de la nourriture. Un cortège c’est ensuite formé dans la ville afin de rompre d’une manière forte le silence des médias sur la question des besoins matériels refusés à toute personne qui veut continuer son voyage à l’intérieur de la forteresse Europe, sur les expulsions quotidiennes effectuées par les autorités françaises en complicité avec les italiennes, et sur les identifications forcées, souvent accompagnées de violences et même de torture. Cette action solidaire a rassemblé des personnes venant d’Italie et de France, montrant ainsi la possibilité de s’unir et de mener les luttes contre les frontières en attaquant celles-ci des deux côtés à la fois.

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