Les médias italiens ont récemment rapporté que, selon les données du ministère de l’Intérieur, 18 125 personnes auraient été refoulées vers l’Italie au cours des 12 derniers mois par les autorités françaises à la frontière de Vintimille. Les collectifs militants qui surveillent les pratiques quotidiennes à la frontière italo-française ont de leur côté comptabilisé pour le seul mois de juin 897 personnes arrêtées puis renvoyées depuis le poste frontalier du pont San Luigi.
A ces chiffres se rajoutent des témoignages recueillis par ces derniers sur les pratiques illégales de la police des frontières française : « Parmi ces personnes [arrêtées durant le mois du juin], il y avait 40 femmes, 6 enfants et 16 mineurs non accompagnés. Leur âge a été falsifié [par la police à la frontière], où elles sont enregistrées comme étant des enfants de familles de leur nationalité, même si ce n’est pas le cas. Elles arrivent à notre point d’information après avoir été détenues pendant 10, 12, jusqu’à 15 heures dans des conteneurs, sans eau ni nourriture. […] Le flux a changé aujourd’hui. Peu de gens sont des nouveaux arrivants qui viennent de Méditerranée. Il y a des gens chassés des centres d’accueil italiens, il y a les victimes des lois Salvini qui possèdent encore un permis de séjour pour des raisons humanitaires mais comme ceux-ci sont maintenant abolis et donc non renouvelables, essayent de quitter le pays avant la date d’expiration. Certains sont des demandeurs d’asile en France, expulsés sans raison juridique valable. D’autres viennent d’Allemagne et de Suisse expulsés à cause du traité de Dublin, mais nous avons aussi rencontré des hommes et des femmes qui vivent en Europe depuis 5 ou 10 ans et qui sont expulsés en prenant pour excuse qu’ils viennent d’arriver. »
Les violences policières sont toujours courantes et viennent renforcer les moyens de dissuasion mis en place pour bloquer la frontière. En juin, deux bus privés ont été affrétés par les autorités italiennes pour transférer de force 25 personnes (arrêtées après leur tentative de passage) au hotspot de Tarante, situé 1000 km au sud de l’Italie. Des militants témoignent de la répression envers ceux qui ont refusé de monter à bord du bus : « Un demandeur d’asile qui ne devait pas être embarqué a protesté contre ce qui se passait pour ses amis. Cela a suffi pour qu’on lui fasse prendre le bus également et être transféré à Tarante. La police a reconnu son erreur une fois qu’ils étaient déjà dans le sud et, prétendument, a payé le billet de train pour qu’il puisse revenir à Vintimille, mais celui-ci n’a pas été revu depuis. »
Pourtant, la frontière entre les deux pays est loin d’être fermée et reste perméable. Les collectifs présents sur place constatent : « presque chaque jour 20 personnes arrivent à Vintimille et 20 personnes la quittent. » Cette frontière, ainsi que beaucoup d’autres, fonctionne comme un laboratoire pour expérimenter de nouveaux niveaux d’abus et de brutalité. Elle montre également l’absurdité des entraves et des atteintes aux droits des personnes à circuler librement.