Face à ce qu’ils ont désigné comme « crise des réfugiés », les gouvernements européens se sont distingués par une politique de restriction en matière des droits des étrangers et par une répression alliant tour à tour expulsions à la chaîne, enfermements, violences policières et refoulements illégaux à la frontière. Loin des idées reçues véhiculées notamment par les idéologies nationalistes, populistes et d’extrême droite, le respect de l’accueil des populations immigrées n’a rarement été autant bafoué, et les entraves à la liberté de circulation aussi flagrantes.
Ainsi, le droit à demander l’asile dans le pays de son choix reconnu par la convention de Genève se trouve acculé entre la réintroduction des contrôles aux frontières au sein de l’espace Schengen et les refoulements massifs menés conjointement par différentes forces de polices et militaires. En France, plus de 86 000 refoulements ont été recensés officiellement en 2017, principalement dans le département des Alpes Maritimes ! De nombreux mineurs non accompagnés se voient refuser la prise en charge qui leur est due au titre de la protection de l’enfance sans que l’on sache combien sont contraints à se débrouiller par eux mêmes, sans hébergement, ressources, ni scolarisation. Certains sont même emprisonnés quand la préfecture les suspecte de présenter des certificats de naissances non valables ! L’État fait tout son possible afin de se déresponsabiliser de ses prérogatives !
Mais la répression vient également s’abattre sur les personnes solidaires venant en aide aux étrangers et remettant en cause ce système injuste et punitif. Investi depuis plusieurs années dans le soutien aux personnes migrantes, Robert Latapy a participé en avril dernier à la mobilisation pour s’opposer à l’expulsion en Guinée de Moussa, où sa vie est en danger. A l’issue de la manifestation du 29 avril à Nîmes où un tag « PRÉFET DE N » est inscrit sur le mur de la préfecture, il est interpellé et mis en garde à vue. Conduit au tribunal, le juge décide de le poursuivre pour dégradation et outrage à personne dépositaire de l’autorité publique, avec un procès le 27 septembre, assorti d’un contrôle judiciaire jusqu’à cette date lui interdisant de se rendre dans le Gard. L’affaire est montée jusqu’au ministère de l’intérieur!
Son procès, comme tant d’autres, est le reflet de la volonté gouvernementale de faire taire toute opposition contraire à sa politique. Des nombreux solidaires de la Roya inculpés au titre du fameux « délit de solidarité », à ceux du Briançonnais qui passeront en procès le 8 novembre à Gap pour avoir participé à une marche spontanée faisant suite aux provocations d’un groupe identitaire au col de l’Échelle, la criminalisation de la solidarité bat son plein. Cette réalité est également présente partout en Europe. Le 21 août, une réfugiée syrienne et un bénévole grec appartenant à une organisation de sauvetage sur l’île de Lesbos ont été incarcérés et poursuivis pour « trafic humain, espionnage et appartenance à une organisation criminelle ». Quelques jours après, c’était au tour de six pêcheurs tunisiens d’être arrêtés pour « aide à l’immigration clandestine » et écroués à Agrigente en Sicile après avoir remorqué une embarcation avec à son bord 14 réfugiés au large de Lampedusa.
Avec l’application du délit d’aide à l’entrée et au séjour d’étrangers en situation irrégulière, mais également en poursuivant des solidaires pour des faits caractérisés comme des délits et des crimes relevant du droit pénal, les gouvernements souhaiteraient faire passer pour une forme de délinquance ou de criminalité ce qui relève pourtant d’une répression d’ordre politique. C’est aussi l’un des moyens d’isoler et d’individualiser les protagonistes d’un mouvement de revendications et de contestations collectives, de tenter de le faire taire, et de stopper l’élan de solidarité porté en actes par une large part de la population.
Ainsi, la revendication de nos droits, pour les personnes migrantes et les personnes engagées à leurs cotés, est essentielle dans tous les domaines où ils sont menacés. Là où les gouvernements se refusent à tout débat sur cette question politique majeure, et agrémentent de ce fait les tensions tout comme la montée des droites radicales, mettre en place des solidarités concrètes et affirmer la liberté de circulation, d’installation et l’égalité sociale semblent être la seule porte de sortie à cette « crise » des gouvernances migratoires.
RASSEMBLEMENT EN SOUTIEN A ROBERT
TGI DE NÎMES (FACE AUX ARÈNES)
JEUDI 27 SEPTEMBRE A 14H